Aujourd’hui nous explorons une ville gigantesque, peuplée de près de 12 millions d’habitants, où les rickshaw sont interdits pour fluidifier la circulation, dotée d’une longue histoire coloniale et d’une architecture hétéroclite mais harmonieuse, ville extrêmement dense mais luxuriante… Bienvenue à Mumbai ! C’est la capitale financière et économique de l’Inde, abritant Bollywood et son industrie cinématographique impressionnante (environ 1 200 films produits en 2012). La superficie de la ville est de 604 km2 contre 105km2 pour Paris. Et la région de la métropole de Mumbai compte 20 millions d’habitants pour une superficie de 4400 km2 contre 8 millions d’habitants et une superficie de 1 214km2 pour la métropole New-Yorkaise. Ça donne un ordre de grandeur.
Mais arrêtons-nous là avec les chiffres, je ne suis pas là pour vous faire un TPE. Mon cher chti étant parti en 2011 un mois en Inde du Sud tout seul… et m’en ayant tant parlé, j’avais alors très très envie de moi aussi de découvrir une partie de cet immense sub-continent. Nous avons donc décidé d’aller explorer ensemble l’Inde du Sud : lui retournerait sur ces lieux qu’il avait tant aimés pour les partager avec moi, et moi essayerait de lui faire découvrir de nouvelles choses…
Le temps de courir après nos chefs au travail pour leur extirper des vacances, les billets d’avion pas chers que nous avions repéré (350€ A/R) nous ont glissé entre les doigts. Déterminés, nous avons fini par payer plus cher, foncé rue de Paradis dans le 10ème arrondissement pour faire nos visas pour enfin décoller et rejoindre ce pays de superlatifs.
Finalement, je ne connaissais de l’Inde que peu de chose : les reportages que j’avais pu voir, les livres que j’avais pu lire (je me rappelle de Noces Indiennes de Sharon MAAS), les préjugées que j’ai pu avoir, les histoires que l’on raconte, le récit de voyage… une sorte de grand point d’interrogation.
On dit qu’on ne repart pas indifférent de cet immense pays, qu’il vous bouleverserait que ça soit en bien ou de façon négative. Il existerait même un « syndrome indien » : les visiteurs du pays seraient tellement déboussolés par ce pays où ils n’ont aucun repère, aucune marque culturelle à laquelle s’identifier (cet article ainsi que celui-ci explique bien le phénomène). De mon côté, j’en suis repartie enchantée avec la ferme envie d’y retourner le plus vite possible. Aller explorer le nord du pays, l’Himalaya, de vivre les moussons… mais parlons d’abord du sud !
J’ai pris la majorité des photos de cet article avec mon télémétrique Ricoh car il est plus pratique à mettre dans une poche et à dégainer rapidement. Malheureusement malgré mon changement de mousse, de la lumière rentrait encore dans le boitier ce qui donne un voile rouge sur la majorité des photos. Les autres sont prises avec mon Minolta, et quelques-unes au numérique. J’ai utilisé du film kodak portra.
Samedi 19 avril
Le samedi, nous atterrissons dans la matinée, prenons un pre-paid taxi au guichet à l’aéroport pour éviter de nous faire enquiquiner tous les deux mètres en sortant. Directement, on est dans l’ambiance à l’intérieur de cette vielle voiture rigolote. Nous nous rendons directement dans le quartier de Colaba pour dormir à la Red Shield Guest House, en gros l’ancienne croix rouge qui est devenue une guest house/ auberge de jeunesse, repaire des routards parmi les moins chers de Bombay et bon point de chute pour faire des rencontres sympathiques. « Salvation Army » (l’armée du salut) de son petit nom est situé dans la rue derrière le fameux Taj Mahal Palace, lui en front de mer (ce qui est très pratique pour indiquer aux taxis, qui ne connaissent pas forcément bien la ville, il faut leur montrer la route aha). Nous prenons un lit dans un dortoir chacun et partons à l’exploration du quartier de Colaba, profitant du coucher du soleil en trainant du côté des ports au sud de la péninsule.
Le Barbu qui porte les marques du voyage en avion sur son visage…
Le quartier de Colaba
La Californie ? Non, Mumbai !
Dimanche 20 avril
Nous partons à pied nous promener vers le quartier Churchgate, traversé par une coulée verte : c’est une immense étendue d’herbe bordées de grands arbres où des centaines d’hommes et adolescents jouent au cricket toute la journée. Autour, les rues sont remplies de bâtiments chargés d’histoire. L’architecture est un mélange de style gothique anglais témoignant du passé colonial et d’immeubles plus ou moins modernes, mais le tout s’articulant de manière harmonieuse, la végétation luxuriante y mettant son grain de sel. J’ai toujours aimé les villes où la végétation était très présente, où il y a de grands espaces qui « respirent » entre béton, macadam et pavés. Le sud de Mumbai présente ces caractéristiques entre immenses parcs, la mer qui l’entoure de part et d’autre et cette végétation qui s’immisce partout, fruit du climat tropical.
Nous découvrons le quartier de la gare Victoria, et nous faufilons dans les ruelles où nous croisons nos premières vaches sacrées indiennes. Là nous cherchons une boutique pour avoir une connexion internet, car notre amie Thali rencontrée en Indonésie nous avait parlé d’une amie à elle vivant à Mumbai. Et j’avais également le contact du bureau de mon travail dans la ville, où j’aurais pu prendre les conseils précieux d’une journaliste vivant ici. Nous finissons par la trouver, mais nous échouerons à mettre en place des rendez-vous…
Nous profitons de la gare pour aller réserver un billet de train pour partir vers le sud de Mumbai quelques jours plus tard. Ici, comme il s’agit d’une grande gare, les touristes étrangers disposent de quotas de place à réserver dans les trains. Ce ne sera pas aussi facile pendant le reste du voyage… à vrai dire, il s’agira là du seul train pour lequel nous aurons une réservation, tous les autres tickets seront pris à la dernière minute, et nous voyagerons en dernière classe sans siège attribué. Mais je vous en reparlerai !
Quartier Churchgate/ autour de la high court et de l’université
Au sud de la ville s’étend des immenses terrains de cricket, occupés toute la journée même sous le cagnard
à la boutique internet, pour essayer de joindre notre amie qui a vécu à Mumbai et moi le bureau d’une collègue sur place
La célèbre gare gothique Victoria Station ! et « Municipal Corporation Building »
Scènes de vie devant la gare
Photos : Le barbu au numérique
Nous visitons ensuite le Crawford Market, accompagnés d’un vieux monsieur. Le bâtiment de 1869 a été conçu par l’architecte britannique William Emerson et la drôle de fontaine au milieu de celui par le père de l’écrivain Rudyard Kippling, Lockwood Kipling (ces noms!!!). Il y a de tout là-dedans, des fruits, légumes, viande, poissons, épices, riz… et des animaux domestiques : poulets, lapins, chats, oiseaux, chiens ! Quelle surprise de trouver cet entassement d’animaux à côté des gens assis par terre qui rangent des mangues dans des caisses en bois remplies de paille.
Photo numérique
La Sir Jamsetjee Jeejeebhoy School of Art
Fondée en 1857 par le riche philantrophiste Sir Jamsetjee Jeejebhoy, c’est la plus ancienne école d’art de la ville, aujourd’hui rattachée à l’université de Mumbai. Elle se situe entre la gare Victoria et le marché Crawford, un peu après le Times of India. Nous l’avons retrouvée un peu par hasard, car le Barbu l’avait visité lors de ses tribulations la première fois à Mumbai. Nous avons trouvé un trou dans le mur et nous sommes baladés dans les cours vides (c’était les vacances scolaires), admirant les sculptures, les bâtiments et les peintures sur les murs.
Photos : le Barbu au numérique
Au fond de l’école, on trouve la maison natale de Kippling, l’auteur du livre de la jungle. C’est une belle demeure coloniale en bois… mais qui n’est apparemment pas très entretenue, dommage !
Après notre découverte de ce quartier et s’être fait refouler à l’entrée de l’Université de Mumbai (apparemment, il y avait un évènement), nous nous dirigeons vers la baie et Marine Drive. Sur la route, nous nous jetons affamés sur la terrasse fraiche du restaurant végétarien Shiv shagar. Je prendrais un Palak Paneer (épinards au fromage indien), un cheese garlic nan (galette fourrée au fromage et recouverte de morceaux d’ails et d’herbes – il existe la version butter cheese garlic nan, soit avec du beurre indien dessus, meilleure invention du monde) et de l’Aloo Jeera (des pommes de terre au cumin). Le tout accompagné d’un délicieux jus d’orange pressé. Bref, c’était juste parfait, le service était super mignon et attentionné donc je vous recommande bien sûr ce restaurant !
Black Bay et Marine Drive
Comme Mumbai est située sur une péninsule les limites de la ville se matérialisent souvent par d’immenses baies. Ici au sud-ouest, c’est la courbe de Black Bay qui dessine la ville et dévoile un petit morceau de son immensité. (Pour réaliser la véritable immensité de Mumbai, rien de tel que 50 minutes de taxi en prenant les voies rapides depuis les quartiers nord de la ville pour en avoir une idée). Marine Drive est la route bordée d’un large trottoir sur lequel on peut marcher le long de la baie. Je ne vous conseille pas de vous lancer dans une telle expédition au milieu de la journée car c’est très long et il y a très peu d’ombre. Au sud de la baie il y a des ports, et au nord-ouest on y trouve la fameuse plage de Chowpati Beach (on ne s’y baigne pas, mais elle constitue un lieu de promenade et de retrouvailles pour les habitants après le travail).
Photos numériques
Nous finissons par atterrir dans un petit parc vers Nariman Point, tout au sud de la péninsule. Des enfants qui jouaient au cricket viennent nous parler. Nous lézardons sur le gazon sec en nous déplaçant en même temps que les ombres des palmiers, avant de reprendre notre marche vers le quartier de Colaba où nous résidons.
Scènes de vies au Salvation Army
Le Barbu avait déjà résidé au Salvation Army lors de son premier voyage en Inde et avait très envie d’y retourner. Bien que je lui fasse confiance, avant d’avoir vu l’endroit, j’imaginais le pire aux vues du nom. (Il m’avait aussi parlé d’une fille qui s’était fait dévorer par des bed bugs, pas très rassurant). Finalement c’est un vieux bâtiment très sympathique avec un personnel accueillant, vêtu d’un uniforme rouge passé. Après une nuit un peu difficile en dortoir chacun de notre côté, nous avons fini par prendre une chambre double (ce qui n’est pas excessivement cher). Elle était très agréable, nous avions la vue sur le Taj Mahal Hotel et les très grands arbres en face de nous… en tout cas si je retourne à Mumbai, c’est le premier endroit vers lequel je me dirigerai en arrivant !
Nous y croisons un hongrois qui se laisse attirer par les sirènes de Bollywood (espérons qu’il ne se soit pas fait arnaquer), une portugaise très cool, un couple d’anglais avec qui nous trainerons quelques jours, des jeunes, des vieux, des asiatiques en goguette, des illuminés, des un peu moins. Heureusement pas trop de gens qui portent des sandales à scratchs. (tongs forever)
Dimanche 20 avril
Exploration de la péninsule ouest : maison de gandhi, malabar hill et les jardin suspendus
Le dimanche, nous décidons de partir explorer le quartier de Malabar Hill. Après un trajet en taxi, nous commençons par nous mettre quelque chose sous la dent au resto Soam juste derrière Chowpatti Beach (sur un conseil du guide du routard). C’est un peu cher (pour l’Inde) mais ils ont des plats vraiment délicieux ! Par contre le restaurant est très très climatisé, foulard indispensable sous peine d’angine en remettant les pieds dans la fournaise extérieure.
En déambulant dans la rue KM Munshi Rd, on s’est fait inviter par un indien à visiter le Sri Sri Radha Gopinath Mandir, un temple hindouiste (la Society For Krishna Consciousness). C’était vraiment fascinant. Des moines pieds nus ont voulu nous offrir un repas. Un monsieur du temple qui a essayé de nous expliquer des choses sur leurs croyances (sur Shiva, Krishna, l’origine de l’univers ect). J’ai eu l’impression de discuter avec mon voisin italien chercheur en mathématiques pures : tu saisis en gros mais en fait tu ne retiendras pas car ton cerveau n’est pas préparer pour absorber toutes ces infos. Que ça soit en français avec l’accent italien qu’en anglais avec l’accent indien.
Ensuite, après avoir acheté de l’eau, direction le musée dans la dernière résidence de Gandhi, à quelques blocs de là. La maison est très jolie et j’ai trouvé le musée intéressant et pas prise de tête pour mieux comprendre le parcours et l’histoire de cet homme légendaire. Après la visite, nous repartons en direction des jardins suspendus et de Malabar Hill, pour avoir une vue élevée sur cette ville dont on ne voit pas le bout.
Promenade dans les rues derrière la maison de Gandhi
Les jardins suspendus
Nous continuons donc notre promenade en grimpant sur les hauteurs pour découvrir les jardins suspendus. Le nom laisse rêveur, mais il s’agit en fait d’un parc plutôt banal. Comme nous étions juste en pleine période sèche, les jardins l’étaient un peu également. Mais ce petit perchoir qui permet d’avoir une vue sur la ville et la baie apporte un peu de calme, à l’ombre des arbres.
Malabar Hill et Banganga
Le quartier de Malabar Hill est connu pour être celui où les stars de Bollywood vivent, sur les hauteurs et avec une vue époustouflante sur la ville. C’est le quartier le plus cher de la ville. Pas loin des jardins suspendus, à l’abri des regards se trouvent dans un parc de 218 km2 les tours du silence de la communauté Parsi. Cette communauté Perse zoroastrienne a jadis quitté la perse pour l’Inde à la suite de la conquête de leur territoire par les musulmans. L’Inde garantissant le « libre exercice » de toute religion, la communauté existe toujours même si la population parsie décroit à cause du fait qu’ils doivent se marier qu’entre eux et refuser la conversion. Aujourd’hui la majorité des Parsis vivent à Mumbai et travaillent généralement dans l’administration et la culture. Pour citer quelques Parsi célèbres : la famille Tata, très célèbre (en Inde et dans le monde) et le chanteur de Queen, Freddie Mercury (pour en savoir plus).
Il est très agréable de se promener sur Malabar Hill car il y fait plus frais, les rues sont propres et la végétation y est encore plus luxuriante qu’ailleurs…
Malabar hill
Et lorsqu’on arrive en bas de la colline, on arrive vraisemblablement au « village » de Baganga : un Bombay « à l’ancienne » avec ses petites maisons et ses temples… mais un quartier qui contraste fortement avec Malabar. On se croirait vraiment dans un village indien et non la mégalopole !
L’impressionnant et très ancien « tank » de Baganga
Photos numériques du Barbu
Les laveurs de linge « dobhi gat » du quartier de Banganga
Un des temples du quartier de Banganga
Lundi 21 avril
Nous prenons le petit-déjeuner avec nos deux comparses britanniques en nous remettant de la soirée de la veille, avant de prendre un taxi pour nous rendre à la gare de Lokmaniak Tilak (que nous ne localisons pas sur la carte). Nous finissons par trouver un taxi qui sait où c’est. Après une loooongue course à travers les rues de Bombay et de ses quartiers moins connus, nous y voici. Nous réalisons alors que nous sommes les seuls occidentaux de la gare… ce qui nous vaut quelques regards curieux. Après avoir lâché un petit bakchich, nous pouvons nous installer dans la salle d’attente pour passager munis de billets de classe supérieure où il y a des FAUTEUILS ! (nous avons des billets en « sleeper » 2e classe, c’est-à-dire des banquettes en skaï bleu et des fenêtres sans vitre, mais l’assurance d’avoir une place assise et une banquette en hauteur pour dormir). Nous attendons donc perchés sur ces gros fauteuils en cuir, regardant un rat qui se ballade dans la salle à la recherche de miettes, le monsieur qui ronfle sur son fauteuil, et les familles qui ont les moyens de se payer ces bons billets qui vont et viennent dans la pièce. Nous finissons par partir, comme le Barbu me l’avait promis, nous trouvons nos noms affichés sur une feuille collée à l’entrée de notre wagon (la joie d’avoir pu réserver) et embarquons donc à notre place. S’en suivront nos premières douze heures de train pour la petite ville de Gokana, au bord de l’océan indien et au sud de l’état de Goa….
Devant la gare à perpette les oies
Vous êtes arrivés jusqu’ici ? Bravo ! (et merci)
Alors, qu’avez vous-pensé de ma vision de Mumbai ? Êtes vous surpris par rapport à ce que vous imaginiez ? Ou bien y êtes vous déjà allés ?