Nous étions à Kockor où nous avons fait une randonnée à cheval jusqu’au lac d’altitude Kol Ukok et désormais nous voici à nouveau sur la route pour rejoindre le village de Kyzart dans la vallée de Suusamyr. Le village est au nord du lac Song Kol et permet de rejoindre celui-ci à pied à moindre frais !
Mercredi 2 septembre : une rencontre inattendue
Nous débutons le stop en début d’après-midi. Après s’être fait déposer à la jonction pour la route menant à Kyzart, un camion nous embarque. On a beau être lents et secoués comme des pruniers par la route pleine de trous, nos routiers sont bien sympathiques et on a de la place pour mettre nos gros sacs dans la cabine. Après deux heures de ballottage intensif, nous sommes déposé en bord de route et finissons le kilomètre qui nous sépare de Kyzart à pied.
La « porte d’entrée » du village, mais il faut encore marcher un bon kilomètre pour y accéder
Arrivant au village, ne disposant pas vraiment d’infrastructures touristiques à part un panneau indiquant « hôtel CBT » nous déciderons d’aller jeter un œil à cette rue. Nous sommes abordés par une femme parlant anglais qui nous accompagne chez elle et nous annonce des prix exorbitants. Nous négocions, mais cela reste peu satisfaisant, et pour ce qui est de dormir sous la tente, nous avons oublié le tapis de sol du Barbu dans le camion… Il décide d’aller faire un tour dans le village pour trouver une autre solution d’hébergement et me laisse donc surveiller les gros sacs entourés de bambins envahissants.
Lorsqu’il revient, une éternité plus tard (je suis toujours entourée d’une dizaine de petits garçons qui me tournent autour, me parlent, jouent avec mes bouteilles d’eau), il a l’air plutôt content. « J’ai trouvé une super jolie maison, tu vas adorer » me dit-il.
En explorant le village (très grand) il est tombé sur cette maison qu’il a trouvée jolie. La grille étant ouverte, il est entré dans la cour (aucune gène aha) et a discuté avec le jeune propriétaire et sa petite famille avec lesquels il a négocié un bon prix. Ils sont ravis et curieux de nous accueillir, même s’ils ne parlent pas anglais. En arrivant, je fais connaissance d’Erjan, de sa femme Zlaika, le petit garçon Nourelle, la bambine Gouzelle et le papi Solr Beck qui couvre cette dernière de bisous. A peine posé le sac dans la chambre qu’ils nous glissent la collection complète de leurs albums photos de famille (une pratique très commune dans le pays). Nous découvrons alors des petits fragments de vie de cette famille encore inconnue. S’ensuit une partie d’échecs avec un très beau jeu sculpté ou le Barbu se fait laminer. Le jeune neveu qui vient d’arriver fait la revanche et s’avère un adversaire très coriacé et doué en stratégie (c’est lui qui va gagner mais il faut pas le dire). Erjan offre un kalpak au Barbu, c’est le chapeau traditionnel kirghize, une affaire sérieuse ! Et puis nous allons diner dans la petite maison attenante. On se lave les mains et c’est parti pour un délicieux plat de patates avec un œuf et bien sur des liiiiitres de chai 😉
La traditionnelle séance photos
jeu d’échec
Jeudi 3 septembre : La grimpette jusqu’au lac Song Kol
Levés de bon matin, nous regardons Erjan préparer le petit déjeuner, Zlaika étant partie travailler à l’école. C’est tout un programme il faut couper du bois pour le feu, alimenter le feu, aller chercher de l’eau, déterrer quelques patates dans le jardin… Nous déjeunons d’un ragout de patates et tripes (tralila) avec Erjan et son fils puis il nous dessine un plan trouver le sentier du lac et nous remplissons notre unique bouteille d’eau et truffons nos petits sacs de tous les vêtements chauds que nous avons avant de nous lancer à l’assaut du col à 3 400 m d’altitude.
La cuisine
Erjan a tenu à nous montrer sa Lada… qui aparement ne fonctionne pas, quelle affaire !
La maison des chambres
Petit déjeuner à base de… tripes.
Notre plan pour nous rendre au lac ! Limpide, non ?
Sinon on avait aussi cela, mais je suis incapable de dessiner l’itinéraire aha (source : Soviet Military Maps)
Nous grimpons à bon rythme la première partie traversant les champs puis évoluons plus doucement dans la première arrête. Nous décidons d’aller faire une pause thé aux deux yourtes de ce versant après deux heures de marche : cela nous fera économiser de l’eau. Nous contournons donc une colline par la gauche pour éviter de grimper tout droit mais décidément les lacets ici non plus ils ne connaissent pas et descendons vers la première yourte. Nous y trouvons une petite mamie qui fait de la couture qui nous accueille pour le chai… et la confiture bien sur ! (50 KGS).
Ca y est ça grimpe
La malicieuse mamie devant sa yourte (et la vue !)
Devant la yourte
La fameuse smetana maison (et en jaune foncé, le beurre rance)
Après avoir enfilé les coupe-vent nous reprenons l’ascension, de plus en plus dure, le long d’un ruisseau où nous rencontrons un troupeau de vaches curieuses. Le chemin disparaît et nous nous trouvons face à un mur abrupt. Le genre chèvre friendly. On s’y attaque, en faisant des lacets à flanc de montagne, on peu à peine poser nos pieds, pas intérêt à glisser car bonjour le toboggan ! Le vent souffle de plus en plus fort, ne rendant pas la tâche plus facile, mais à force de persévérance nous finissons par atteindre le haut de ce mur… et on n’est pas arrivés ! Par contre la vue est époustouflante et on a retrouvé le chemin principal. Nous suivons donc celui-ci qui grimpe fort et duquel il vaut mieux ne pas tomber : c’est vertigineux. Arrivés au col nous voyons enfin l’immensité du lac Song Kol comme une récompense et à son bord quelques yourtes. Ouf, le chemin est moins long pour descendre.
Devant ledit mur
Au dessus dudit mur. ça ne parait pas sur les photos, mais c’est sacrément pentu.
Faut pas tomber
On est bien monté, hein ?
Nos supportrices pour le passage du col
Nous observons le vol de trois aigles immenses au col et descendons tranquillement vers le lac. Nous arrivons au niveau d’un troupeau de chevaux et je craque littéralement sur un poulain. On se regarde comme deux ronds de flancs et sa mère finit par avancer vers nous, suivie par tout le troupeau. On se retrouve entourés de dizaines de juments et leurs poulains et je dispense une séance de gratouille à ces jeunes mignons. Et c’est reparti pour les yourtes.
Love at first sight!
Mon pote de gratouilles
Bon aller il faut descendre maintenant
Tiens, un berger
Nous longeons un petit ruisseau entouré d’un champ de bosses verdoyants et arrivons dans le « village ». Nous commençons à prospecter notre toit arrondi pour la nuit. Le premier échange n’étant pas satisfaisant nous faisons affaire avec un groupe d’hommes buvant de la vodka devant une yourte. Ils échangent leur vodka contre un chai avec des tomates à l’ail puis Myrlan, un des hommes nous propose d’aller faire une balade sur le lac avec sa barque. Nous le suivons et le Barbu n’est pas très rassuré lorsqu’il voit la barque et sa coque toute fine sur cette eau glaciale. Peu importe, nous voici à flots, admirant la vallée depuis les eaux bleues foncées ! Myrlan est tout content de faire du bateau, mais le Barbu n’étant toujours pas confiant en notre embarcation écourte notre équipée pour retrouver la terre ferme sans boire la tasse !
Myrlan le navigateur de Song Kol!
Les barques
A notre retour à la yourte, c’est tournées générales d’arak avec Mars et sa femme chez qui nous logeons, Myrlan, Talaebek… et je n’y échappe pas. Après quelques verres bien remplis descendus tout droit dans le gosier, nous accompagnons Eijan la femme de Mars qui va traire les juments pour faire du Koumys. Pendant que Talaebek tient fermement le poulain, Eijan trait la jument à genoux. Il fait glacial lorsque nous apercevons de la brume sur le lac, la vue est magique ! C’est à ce moment là que Mars revient à cheval avec son troupeau de mouton qu’il rentre pour la nuit. Eijan les compte avec un bâton lorsqu’ils rentrent dans l’enclos, et nous allons donner du grain à la brave monture de Mars.
Eijan trait une jument pour le Koumys
Talaebek tient le poulain pendant la traite
La brume sur le lac, spectacle magique… mais glacial!
Lights out, time for the stars.
Puis c’est reparti pour une tournée ! Après quelques verres supplémentaires, on nous sert un plat de patates avec du poisson du lac, nous voici rassurés de pouvoir remplir notre gosier avec autre chose que de l’alcool bon marché. Mais trop tard, le mal est fait, j’ai vraiment le ventre à l’envers. Mais bon on s’est bien marrés! Après avoir mangé et bu un dernier chai, les invités se congédient et Eijan organise la yourte pour la nuit : nous avons le droit aux matelas près du poêle à bouse. Et les étoiles cette nuit là… un des plus beaux ciels étoilé qu’il m’ai été donné de voir.
Si l’on n’a pas eu froid, on a eu extrêmement soif ! En effet, notre unique bouteille d’eau a bien fini par être bue… et l’on ne peut absorber l’eau du ruisseau sans la bouillir ou y mettre une pastille purifiante.
Vendredi 4 septembre : pas de galop au bord du lac Song Kol
Le lendemain nous prenons un petit déjeuner à base de porridge tiède, de thé et de… confiture bien sur ! Et nous mettons en quête de chevaux à louer pour faire une balade le long du lac, un de mes rêves « préconçus » du Kirghizistan était de galoper sur les verts rivages du lac Song Kol (je rêvais aussi de conduire une Lada). Nous faisons le tour des yourtes, et il s’avère que cela n’est pas possible. On peut nous louer un cheval, mais bon un cheval pour deux ce n’est pas l’idéal (on est pas des Kirghizes nous, on ne se balade pas à deux sur le dos d’un cheval :P) donc on fini par laisser tomber, et annoncer à notre famille que finalement nous repartons ce matin. Nous allons tout de même faire une balade et pique niquer le long du lac, où nous verrons une bande de drôles d’oiseaux huppés et des oies sauvages !
Je pose avec Eijan qui a son foulard à pompons rigolo (et le gentil chien)
Puis c’est reparti pour l’ascension, même si ce côté est plus court, on mettra énormément de temps, et nous boirons quasiment l’intégralité de notre bouteille d’eau gout piscine (merci les pastilles) dans cette montée. La rando gueule-de-bois, tout un concept. Une fois au col, le paysage est encore plus incroyable que la veille car le ciel est d’un grand bleu et l’on voit bien les sommets enneigés en face.
Ich bin krank.
La descente sera lassante, en pente très raide. Nous pensons aux chevaux qui descendent cela avec des cavaliers sur le dos… mais quand nous voyons où passent les bergers à cheval et leurs troupeaux, à flan de montagne nous comprenons mieux l’ampleur de la dextérité et de l’endurance des chevaux kirghizes.
Quelle joie lorsque nous arrivons au village et racontons nos aventures à Erjan et Solr Beck, très amusés par le fait que j’ai bu. Oui une femme ça boit aussi de l’alcool ! Mais bon je ne fais pas la fière, j’ai encore mal au ventre. Après de grandes discutions dans la cuisine, nous dinons d’un plov, le plat national (du riz pilaf, des carottes/poivrons et quelques bouts de viande).
Le lendemain nous avons une longue journée de stop qui nous attend pour rejoindre le village de Kyzyl-Oi dans la vallée de Suusamyr, connu pour ses montagnes rouges…
8 Comments
[…] poursuivons notre route après le trek jusqu’au lac Song Kol et décidons de traverser tranquillement en stop la vallée de Suusamyr réputée très belle pour […]
[…] le logement, les moins chers ont été nos nuits chez l’habitant : Erjan près du lac Song Kol et au jailoo de Suusamyr où nous avons été hébergés. Pour les logements […]
Tu me fais bien rire ma grande, l’aventure c’est pas toujours facile surtout avec un coup dans l’aile, mais ça fait des bons souvenirs!!!
les paysages sont fabuleux ça valait le coup de faire l’ascension.
Oh que oui, ça on a bien rigolé 😉
[…] une mini serviette éponge normale pour laquelle on se battait mais on l’a oubliée chez Erjan au Kirghizistan donc problem solved. (acheté pour le […]
Oh la la je compatis pour le mal de ventre, En ce qui me concerne, c’est le Koumis qui m’a détraqué les intestins… Et je salue votre effort pour vous être rendus à pied jusqu’à ce splendide lac. Au début août il faisait déjà frais, j’imagine qu’en septembre, ça devait bien cailler. Je me suis plongée avec délice et une certaine nostalgie dans ce billet très bien illustré. Vous avez été chanceux de pouvoir déguster du poisson. Saturés du mouton gras, nous en avons vainement cherché auprès de plusieurs pêcheurs du cru 🙁
Bonjour,
Nous partons pour trois jours de trek de kizart à Tuz Achuu (lac song koul) et nous posons la question des chaussures.
Nous randonnons bcp dans les Alpes françaises avec des chaussures de trail (très bonnes semelles).
Est-ce que cela convient compte tenu des types de sentier ?
Merci de votre réponse
Pascale
Bonjour ! Mon Barbu a fait toutes ses randos en chaussures de trail sans aucun soucis, et ce n’est pas un grand randonneur 🙂
Profitez bien, je suis jalouse 😉